Les Cimmériens
En pratique : Quelles sources sont attendues ? Comment ajouter mes sources ?
Les Cimmériens sont un peuple de l'Antiquité, supposé d'origine indo-européenne, peut-être apparenté aux peuples iraniens, installé en Tauride et sur le pourtour de la mer d'Azov avant de se disséminer aux viiie et viie siècles av. J.-C. sur tout le pourtour du Pont Euxin en Asie mineure ainsi que dans les Balkans.
Les Cimmériens étaient un peuple cavalier nomade initialement signalé dans la steppe pontique, au nord du Pont Euxin (aujourd'hui la mer Noire), comme ce sera aussi le cas, après eux et successivement, des Scythes, des Sarmates, des Iazyges, des Roxolans, des Alains, des Huns, des Avars, des Bulgares, des Magyars, ainsi que de nombreux peuples turcs (Khazars, Petchénègues, Kiptchaks, Tatars…). Les Cimmériens étant les plus anciennement mentionnés, les sources écrites (des passages d'Hérodote et de Strabon, des tablettes assyriennes…) sont très succinctes. On a rapproché ce peuple des civilisations néolithiques pontiques révélées dans le même périmètre géographique par les fouilles archéologiques : nous sommes là davantage dans la protohistoire, que dans l'histoire, et on ignore presque tout de leur vie religieuse, sur laquelle les renseignements proviennent des tumulus funéraires contenant des représentations de déités anthropozoomorphes, centaures, chimères, dragons ourobores. Ces artefacts montrent des ressemblances avec ceux des cultures de Sintachte et de Srubna en Europe orientale, et avec la culture de Novotcherkassk dans l'actuelle Russie méridionale. Si l'origine des Cimmériens n'est pas encore totalement élucidée, leurs habitudes funéraires dont la position des défunts semblent les ranger du côté des Celtes. Leur localisation géographique les placeraient vraisemblablement sous la culture de Kemi Oba ainsi que sous la culture de Maïkop et ultimement de la culture de Sredny Stog, ils auraient toutefois été assimilés aux Scythes (émergeant de la culture de Yamna) durant l'âge du fer ce qui rejoint les données génétiques recueillies à ce jour. Seules les recherches linguistiques peuvent apporter quelques données complémentaires sur leurs apparentements.
Dans l'Antiquité, la Chersonèse (« presqu'île » en grec) était la Crimée. Les Cimmériens s'y sont installés vraisemblablement dès 1200 av. J.-C., dans le territoire qu'Hérodote appelle le « Bosphore cimmérien ». Vers 700 av. J.-C., les peuples cavaliers de la steppe subissent la crise climatique de cette période dite Subatlantique6, et les Cimmériens sont soumis à la pression des Scythes, eux-mêmes soumis à celle des Massagètes7. La noblesse cimmérienne tente de résister mais le peuple finit par se disperser, une partie se dirigeant vers le centre de l'Europe, une autre vers l'Anatolie. Hérodote rapporte qu'il subsistait encore des murs cimmériens dans le pays des Scythes et qu'une région porte le nom de Cimmérie, qui serait la Crimée. La principale différence connue entre Cimmériens et Scythes concerne l'art, dominé par des symboles géométriques chez les Cimmériens tandis que l'art des Scythes est surtout zoomorphe.
Vraisemblablement en raison du climat de la période dite Subatlantique, les Grecs de l'Antiquité les disaient « Peuples de la Nuit »8. Homère écrit que leur pays est « couvert de nuées et de brumes » que « les rayons du soleil ne percent jamais »9 : Éphore de Cymé rattache cette légende de nuit éternelle à leurs habitations dans des grottes reliées par de longues galeries creusées dans la roche volcanique. On a corrélé la période Subatlantique à des éruptions massives en Islande, avec injection dans l'atmosphère de cendres cachant le Soleil durant plusieurs années, et dépôt éolien de ces mêmes cendres que l'on retrouve intercalées entre les strates de lœss10. Probablement victimes de la mort de leurs troupeaux et de mauvaises récoltes, les Cimmériens n'avaient d'autre choix que de se porter vers des régions plus méridionales, moins touchées par les perturbations climatiques.
Vers 708 av. J.-C., ils franchissent le Bosphore et/ou le Caucase11 et établissent une colonie dans la région de Sinope7. Ils vivent alors de piraterie et de pillage, et poursuivent leur progression jusqu'à l'Assyrie. Ils commencent par s'attaquer au royaume d'Urartu, dans la région du lac d'Ourmia. Le roi Rusa Ier puis son fils Argishti II ne parviennent pas à les contenir et subissent de lourdes défaites. Les Cimmériens sont alors crédités d'une réputation de redoutables guerriers dans toute la région.
Arrêtés en Cappadoce par Assarhaddon en 679 av. J.-C.(ou -695), ils se dirigent vers le royaume de Phrygie, où ils battent le roi Midas, puis vers la Lydie où ils livrent bataille vers 660 av. J.-C. contre le roi Gygès qui doit demander l'aide d'Assurbanipal dont la mort en 644 av. J.-C. leur laisse le champ libre. Les Cimmériens envahissent alors le pays, mettent à sac la ville de Sardes et dévastent la campagne. Entre 650 et 630 av. J.-C., ils sont signalés en Cappadoce, en Cilicie et dans le Pont.
Après la mort du roi des Cimmériens Lygdamis, vers 620 av. J.-C., les rapports de combats sont de moins en moins nombreux. Selon les auteurs grecs, le roi lydien Alyatte II chassa les envahisseurs et mit un terme définitif à la menace cimmérienne vers 610 av. J.-C.
On connaît sous le nom de Cimmériens un peuple de l'Antiquité mentionné par Homère (Odyssée, XI, XIV et suiv.); on les considérait comme habitant les confins de la terre, le rivage de l'Océan à l'Ouest, où Hélios ne luit pas, et demeurant dans une nuit éternelle. Des idées vagues et inexactes avaient donné naissance à cette opinion qui se fondait néanmoins sur un fait géographique; d'autres mythes similiares se retrouvent dans la Genèse (X, 2, 3) : Gomer, qui semble identique à ce nom des Cimmériens, est cité comme le premier fils de Japhet, et comme frère de Magog, Modaï, Javan, Thubd, Mesech et Thiras. La Bible cite également les fils de Gomer, Askenas, Riphath et Thogarma. Le nom de Riphath se retrouve dans les montagnes rhiphéennes des Grecs, l'Oural d'aujourd'hui, qui semble avoir été le pays des Cimmériens.
Les Cimmériens paraissent dans les textes assyriens vers le VIIe siècle comme adversaires des Assyriens, et notamment dans les textes d'Assurbanipal, comme vainqueurs de Gygès, roi de Lydie; on les trouve sous le nom de Gimerri dans les textes cunéiformes. Hérodote nous raconte que sous le règne du fils de Gygès, Ardys, les Cimmériens, poussés par les Scythes, envahirent l'Asie et prirent Sardès, sauf l'acropole. Le roi Alyattès (605-556) débarrassa définitivement l'Asie de ces hordes sous le nom desquels les Assyriens comprenaient toutes les peuplades de l'Asie centrale. L'appellation générale de ces populations était chez les Grecs, Scythes, chez les Perses, Saces et chez les Assyriens, Gimirri. Dans l'inscription perse de Behistoun, Darius dans la traduction assyrienne emploie le nom de Gimerri avec cette acception large. Les Cimmériens, avant d'être chassés de l'Asie, habitaient, dit-on, la Tauride qui prit le nom de presqu'île cimmérienne, lequel se serait perpétué jusqu'à nos jours dans le nom de rimée.
On a voulu confondre les Cimmériens avec les Cimbres et avec les Kymris. La première de ces identifications paraît osée, la seconde a été souvent attaquée. Il se peut que les Cimmériens et les Gimirri fussent véritablement Celtes et une branche de ce peuple pourrait s'être établie dans l'extrême Occident, ce qui expliquerait la légende mythologique d'Homère. Mais on ne peut admettre la distinction de deux peuples mythiques et historiques : les Cimmériens d'Homère sont bien les Cimmériens d'Hérodote. Le chantre de l'Odyssée a bien désigné les habitants de l'extrême Europe qui alors étaient comme ces Cimmériens enveloppés d'une obscurité profonde. Peut-être même ce nom de Cimmériens doit-il être appliqué aux aborigènes des pays d'Europe occidentale. (J. Oppert)..